8 Janvier 1996, un volcan s'éteint !
Des événements marquent le cours de ma vie, et changent parfois le fil de l'histoire.
1981, dimanche 10 mai, 18h45:
Comme toutes les semaines, je viens de passer chercher Alain, un voisin de quartier avec qui je fais la route jusquà Caen: bavardages sur nos faits du week end, et je le dépose une heure après au pied de son petit appartement qu'il retrouve pour une semaine. Quand on fait sciences éco, pas facile d'étudier sereinement en cité U. Pour les autres matières, pareil. J'ai pourtant partagé quelques rares bons moments avec des copains dans ces pièces infâmes et exigues que l'on ose louer comme chambre d'étudiant. Plusieurs raisons me font l'envier secrètement: la vie estudiantine et ses fêtes nocturnes, les nombreuses rencontres qu'il fait, et le rythme de travail qui me laisse penser que c'est plutôt... cool.
Ouais, rien à voir avec une rectifieuse, cette machine-outil de précision sur lequel j'usine mes pièces aéro. Quand elle le décide, la matière est retors, sournoise, et, lourde. Pas toujours facile ce job, mais il me permet de manger, bien, d'avoir un billet qui pousse l'autre (1981: je parle en billets de 20 francs !), de sortir mes potes en voiture, et de faire l'appoint si nécessaire lorsqu'arrivent leurs tours de payer. Ils m'envient pour cette indépendance financière, et se voient en ouvriers modèles. Moi, fin de mois, j'envisage les cours de compta, et mon banquier resserre les boulons !!! C'est drôle ces comportements réciproques ou chacun jalouse et fait un peu le boulot du voisin. Petite boite, peu de collègues, mais quelle bonne ambiance dans l'atelier, le noceur s'appelle Gérard (et nous aurons en commun d'autres aventures...radiophoniques, cette fois).
En avance sur le planning routier qui doit me transporter vers la capitale, je ne me fais pas prier lorsqu' Alain m'invite à boire un petit café dans son appartement douillet. En langage étudiant, le terme douillet désigne les deux conditions suivantes réunies: de quoi s'allonger, voire se vautrer sur le sol, ce qui correspond généralement à un matelas prêté par la famille et, dont l'usage a servi plusieurs générations. Le confort n'est parfait que s'il est accompagné du matériel et des supports de diffusion musicale. Alain a cette chance d'avoir épargné les économies estivales pour s'offrir ce luxe. Chaine Hi-Fi impeccable. Dommage que nous n'ayons que peu de points communs concernant sa programmation. Comme le sujet revient souvent sur le tapis, j'accepte difficilement, de temps à autre, les "effets sonores" de quelques vinyls pendant mes pauses. C'est ainsi que mes oreilles fréquentent CHROME, THE RESIDENTS, MAGMA et autres sons dont j'ai oublié depuis fort longtemps le titre et les dessins sur les pochettes...
Heureusement, la discothèque reste imposante. J'apprécie NEW-YORK DOLLS, ALEX HARVEY, SHANGRI-LA ou bien ATOLL, mais je ne comprendrais jamais la présence incongrue de Patricia KAAS aux côtés de ces raretés d'Import (faut-il une explication pour tout justifier, l'amour est passe-partout ?). D'habitude indifférent, j'eu droit ce soir là au bel organe de la chanteuse, aux cris mêlés et brouhahas lointains passant par la fenêtre du salon entrouverte. Arrivèrent ensuite le fruit des Klaxon, des pétards, des sirènes, tandis qu'un cortège incessant de voitures déversait une foule grossissante vers le centre. Je pensais pure formalité pour mes deux heures et demie de trajet me séparant de la capitale et je pris congé pour m'essayer à cette foule, mais je rebroussai vite chemin. Quelques dizaines de mètres pour reprendre ma voiture, avec l'aide des troupes municipales de Louis MEXANDEAU.
Je n'arrivais pas tout de suite sur l'A13. Quelques quartiers à traverser, des pneus en flammes à des carrefours, des fumées, et des gens s'époumonant sur mon passage.
Seul vers Paris, j'imaginais une périphérique diffuser " l'important, c'est la rose, l'important....
22 heures et quelques...Peut-être un peu tôt pour entendre cela, mais la F.M. ne tarderait pas.
Crédit photo Sipapress.